Premiers rayons du soleil. Elle fronce des sourcils. Malgré ses paupières fermées, Emma se sent éblouie. Ca la réveille. Elle se redresse non sans grogner un peu. Après tout, dormir sur le sol dur de son bureau ne l'aide pas du tout. Elle reste assise, le temps d'étirer un peu son dos, ses épaules et ses cervicales. Ca craque un peu, elle en soupire de soulagement. Elle ouvre les yeux après ça et se lève. Elle se dirige directement vers l'armoire en bois sombre se dressant fièrement contre le mur derrière son bureau, et y attrape de quoi se couvrir.

Il est encore tôt, les étudiants dorment encore. Elle se dit qu'elle aura le temps de se faufiler dans les couloirs, inaperçue, histoire de pouvoir aller se changer. Quelle nuit... D'ordinaire, elle l'aurait passée normalement. Disons plutôt, qu'elle aurait pris sa potion Tue-Loup comme toujours. Mais elle ne peut pas toujours le faire. Elle le sait. Elle sait que si elle la prend trop souvent, un jour, le Loup se réveillera de lui-même. Alors, la nuit dernière, étant une nuit de pleine lune, elle a préféré donner un peu de liberté à l'animal. Dieu sait où ses vêtements déchirés, réduits en lambeaux doivent se trouver à présent. En se regardant dans le miroir, Emma devine qu'elle vient sûrement du côté du lac. Sa peau pâle est salie par la terre par endroit, et celle-ci lui colle un peu trop à la peau et sent un peu trop la vase à son goût. Elle ne se rappelle de rien comme toujours, mais elle se sent rassurée de ne pas avoir de trace de sang sur elle. Dieu seul sait ce qu'elle a donc bien pu faire cette nuit.

Emma lâche un soupir. Elle espère que personne n'aura remarqué quoi que ce soit. Cela doit rester un secret entre elle et le directeur. Un visage surtout lui vient en tête. Milan. Surtout lui. Lui ne devra jamais savoir. Elle lui a menti sur le sujet. Elle ne lui a jamais rien dit. Jamais. Pour son bien. Pour ne pas le perdre à tout jamais. Bien qu'elle l'ai perdu tout de même, elle le sait en vie, et pas mort par ses griffes. Un frisson la saisi. Elle sort de son bureau. Il est plus que temps d'aller à sa chambre. Dans peu de temps l'heure du lever va sonner. Sortant de son bureau elle se retrouve dans sa salle de classe, et entame déjà la traversée dans toute la longueur entre deux rangées de table.

Mais on lui coupe déjà la route. Elle s'arrête. Ses doigts se resserrent rapidement sur le manteau qui la recouvre et cache le mince vêtement cachant son corps. Milan. Elle dégluti et se drape déjà sous son masque froid, distant, celui qu'elle porte depuis qu'elle est ici.

- Bonjour Milan. Que me vaut le plaisir de te voir ici ?

Tenir le masque. Elle doit le tenir. Ses doigts se crispent déjà. Elle sent son odeur. Elle se doit de ne pas montrer l'effet que produit ce regard posé sur elle. C'est compliqué. C'est une torture. Parce qu'elle se sent comme attiré par un aimant...

Le temps sembla s'écouler trop vite. Combien de temps encore avant l'arrivée des étudiants ? Emma n'aima pas vraiment cette situation. Elle avait la vague impression d'être dans une impasse. Milan devant elle, elle s'était refermée davantage. Plus il parlait, plus elle se repliait intérieurement. Arborant ce visage impassible et imperturbable. La porte était toujours ouverte. Ca l'agaçait. L'odeur de MIlan envahissait ses narines. Ca commençait à la rendre folle. Elle sentait son coeur battre. Par le stress qu'il découvre la vérité. Par l'excitation. L'envie de le retrouver. Mais non. Elle ne pouvait pas faire ça. Pour lui, elle devait maintenir la distance. C'était cruel. Elle se faisait du mal. Elle se torturait toute seule à faire ça. Milan. Il la détestera encore plus après ça non ? Au fond, elle n'en avait pas envie. Elle voulait qu'il garde un peu de sentiment pour elle. Mais elle ne voulait pas le mêler à ça. Elle ne voulait pas le confronter face à ce qu'elle était vraiment, tant elle ne se sentait pas prête, tant elle se faisait peur.

Alors qu'il lui racontait ses mésaventures, avouant qu'il voulait la voir, qu'il l'avait cherchée partout, Emma l'avait écarté du chemin, et avait fermé d'un mouvement sec la porte alors qu'il demandait si elle allait bien. La main toujours sur le montant de la porte. Elle inspira pour se détendre. Elle se tourna de nouveau face à lui, l'air grave et sévère.

- Ce ne sont pas tes affaires il me semble. Et je ne vois pas pourquoi tu t'inquiète. Ai-je l'air d'aller si mal ?

Elle avait peut être été un peu sèche. Surtout... Qu'être dans une telle tenue, dans un tel état physique... Bien sûr que ça ne pouvait que générer des questions. Ceci dit, elle reprit un peu de sa contenance. Emma n'était pas nécessairement méchante en soi. Juste sur la défensive. Elle se refusait le droit d'utiliser les mots lycanthropie, loup-garou, et autre terme du même champ lexical. Ceci dit, quelque chose la taraudait soudainement. Il l'avait cherchée... durant la nuit...

- ... Mais tu voulais me voir... Et je suis là. Alors. Dis moi. De quoi tu voulais me parler ? De quoi as-tu besoin ?